Du crayon au stylet
Voyez comment les technologies numériques influencent la production et la préservation des œuvres de Chapleau.
13 mai 2020
Le fonds de caricatures de Serge Chapleau nous permet de suivre de près l’évolution des techniques d’un artiste et de bien cerner les enjeux de la préservation de son œuvre. C’est un fonds dont la source est unique et qui s’étend sur 50 ans de production, ce qui la rend exceptionnelle.
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Voici le lien vers Le fonds de caricatures de Chapleau sous l’oeil d’un restaurateur
Au cours des dernières décennies, il y a eu des changements technologiques importants dans tous les domaines. L’essor des technologies numériques a eu partout une influence énorme, qui se manifeste notamment dans la transformation de la production artistique et des techniques de reproduction commerciale. La pratique artistique de Serge Chapleau est à l’image de ces changements.
Les dessins de Chapleau essentiellement réalisés avec des matériaux traditionnels, tels que le crayon à la mine, l’encre de Chine et les encres colorées avec des teintures, constituent 43 % du fonds et sont datés entre 1969 et 2008. Le fonds comprend ensuite environ 56 % de caricatures finalisées à l’aide d’outils informatiques tels un stylet et une tablette graphique.
Depuis 1994, la démarche de Chapleau consiste à numériser ses propres dessins et à utiliser ultérieurement ces fichiers pour créer l’œuvre finale. Il se sert d’une imprimante laser pour réaliser en partie ses caricatures, tel un collage. Puis, en 2002, Chapleau commence à imprimer ses dessins finaux à l’aide d’une imprimante à jet d’encre couleur dont il se sert encore aujourd’hui.
La grande richesse de ce fonds nous permet de recueillir des informations pertinentes sur sa préservation, sur l’histoire des traitements de restauration déjà réalisés ou sur les travaux à venir. En comparaison avec d’autres fonds de caricatures du Musée, celui de Chapleau est en meilleure condition en raison du choix des matériaux utilisés et du soin que l’artiste a apporté aux œuvres originales.
Alors que d’autres caricaturistes ont fait abondamment usage de techniques et de matériaux parfois hasardeux, tels que des pellicules autocollantes, des crayons-feutres à base de teintures et différentes techniques mixtes pas vraiment compatibles, Chapleau, quant à lui, est toujours demeuré assez puriste dans le choix de ses matériaux.
Cela dit, certains des matériaux plus anciens – comme les encres à base de teintures – qui ne sont pas résistants à la lumière pourraient poser des problèmes de conservation à l’avenir. Les encres en poudre thermoplastique utilisées avec les imprimantes laser contiennent parfois des oxydes de fer, des composés qui peuvent provoquer une détérioration à la fois des matériaux et du papier. Cependant, en ce qui concerne les impressions jet d’encre, nous savons que Chapleau a privilégié des encres à pigment et des papiers de très haute qualité, assurant une longévité impressionnante à ces caricatures.
Les traitements de restauration sont beaucoup moins nombreux sur les documents réalisés par ordinateur. Cela s’explique par l’abandon de matériaux instables tels que la colle et le ruban gommé. La technique du collage disparaît vers l’année 2004, au moment où celle du copier-coller informatique est maîtrisée!
Continuez à me suivre. Ma prochaine contribution relatera les principaux traitements que nécessite le fonds Chapleau.