McGill College : le changement ne date pas d’hier
L’histoire de Montréal à portée de main! Les Circuits urbains, proposent d’en apprendre plus sur l’histoire de certains lieux de Montréal.
18 juin 2024
Vivez une expérience unique hors les murs grâce aux images historiques puisées dans les collections du Musée.
Munis de votre téléphone, explorez divers circuits thématiques et découvrez l’histoire de nombreux sites de la ville et des images témoignant du Montréal d’autrefois.
C’est au tour de l’avenue McGill College de se refaire une beauté et de retrouver sa vitalité – une fois de plus!
Le Musée McCord Stewart vous invitent à faire une courte promenade pour découvrir des bribes du passé de cette belle voie publique. Comme vous le constaterez, l’avenue et les immeubles avoisinants ont subi au fil des ans de nombreuses petites retouches et quelques grandes métamorphoses.
1. DILCOOSHA, MAISON DE JESSE JOSEPH
La bibliothèque McLennan est la plus grande de l’Université McGill. Elle fut édifiée entre 1967 et 1969 sur l’emplacement de ce manoir montréalais, qui a eu plusieurs vocations intéressantes au fil des ans. Construit vers 1865 dans un style appelé Renaissance égyptienne, il fut baptisé Dilcoosha (« joie de l’âme » en hindoustani) par son premier propriétaire, l’homme d’affaires de Montréal Jesse Joseph.
Jesse Joseph (1817-1904) était un homme occupé et prospère. Président de la Montreal Gas Company et de la Montreal Street Railway Company, et directeur de la Compagnie du grand télégraphe du nord-ouest du Canada et de plusieurs banques, il a également investi dans l’immobilier et fit construire le Théâtre Royal de Montréal. Il fut aussi pendant plus de 50 ans le représentant diplomatique de la Belgique à Montréal.
Jesse Joseph était également un donateur généreux et bienveillant dont les dons à des organismes de charité étaient souvent effectués sous le couvert de l’anonymat, car il abhorrait « ce qui sentait la notoriété ». Membre de longue date du conseil d’administration de la Synagogue espagnole et portugaise, située sur l’avenue McGill College non loin de sa maison, Jesse Joseph était président de la congrégation au moment de sa mort en 1904.
Après sa mort, Dilcoosha fut acheté et donné à McGill par Sir William Macdonald, pour empêcher la construction d’un hôtel sur le site. Pendant la Première Guerre mondiale, la maison Joseph fut utilisée par le contingent du Corps-école d’officiers canadiens de McGill, et un champ de tir y fut aménagé au grenier!
En 1919, David Ross McCord (1844-1930) fit don à McGill de sa collection de quelque 18 000 objets relatifs à l’histoire du Canada, accompagnée d’une dotation. Le McCord National Museum ouvrit officiellement ses portes dans Dilcoosha le 13 octobre 1921. Le musée y est resté pendant plus de 30 ans, soit jusqu’à la fin de 1954 lorsque le bâtiment fut condamné à être démoli en raison d’une large fissure qui était apparue dans le mur arrière.
Fils de l’avocat John Samuel McCord et de sa femme Anne Ross, David Ross McCord est né à Montréal. Après avoir fréquenté la High School of Montreal, il a poursuivi ses études à l’Université McGill où il a obtenu un baccalauréat ès arts en 1863 et un diplôme en droit en 1967. S’il travaillait comme avocat, son passe-temps favori – la collection de matériel relatif à l’histoire du Canada – s’est transformé en une véritable passion dans les années 1880.
2. LA VOITURE ET LES CHEVAUX DE MME PAUL
La loge de garde de l’Université McGill a été construite vers 1868. Cette structure en pierre, aux murs de plus d’un demi-mètre d’épaisseur, fut pendant plus de 30 ans la demeure du portier de McGill, John Herbert, et de sa famille. Thomas Graydon, le successeur de Herbert qui voyait à l’entretien des terrains, y a vécu jusqu’aux alentours de 1902.
Malheureusement, la maison fut endommagée par le dynamitage pour le tunnel du Chemin de fer Canadien du Nord, construit entre 1912 et 1918. Les planchers se sont affaissés en 1915, rendant inhabitable le bâtiment qui fut démoli en 1920.
3. PORTAIL RODDICK
Conçu par l’architecte Grattan Thompson et construit en 1924 par l’entreprise de construction Anglin-Norcross, ce portail était un don à l’Université McGill de Lady Amy Roddick à la mémoire de son mari Sir Thomas George Roddick.
Homme ponctuel, Thomas George Roddick (1846-1923) avait souvent mentionné à son épouse que McGill devrait avoir une horloge centrale pour ses étudiants. C’est ainsi que le portait fut flanqué à sa gauche d’une tour d’horloge de six mètres de haut, avec quatre cadrans et quatre cloches en laiton pour sonner les heures.
Diplômé en médecine de McGill en 1868, Roddick a eu l’honneur de prononcer le discours d’adieu de sa promotion. Après avoir commencé sa carrière en chirurgie au Montreal General Hospital, il devint professeur de chirurgie à McGill et plus tard doyen de la faculté de médecine. Roddick fut nommé chirurgien-chef de l’Hôpital Royal Victoria lors de son ouverture en 1894.
On lui décerna le titre de chevalier en 1914, entre autres pour son rôle important dans l’adoption de la Loi médicale du Canada, en vertu de laquelle fut créé le Conseil médical du Canada qui a établi des normes pour encadrer l’enseignement de la médecine et l’enregistrement des diplômés.
4. ÉDIFICE DU Y.M.C.A
Lorsque cette photographie fut prise, cet immeuble abritait le Y.M.C.A. de McGill. Mais pendant presque 20 ans auparavant, c’était un établissement d’enseignement appelé Bute House, dirigé par les sœurs McIntosh. Selon une annonce publicitaire, l’école était « située dans l’un des secteurs les plus sains et les plus beaux de la ville ».
Avant de faire construire Bute House en 1864, les Mlles McIntosh avaient tenu une académie pour jeunes filles à quelques portes de là dans Burnside, la résidence d’été de James McGill.
À Bute House, l’enseignement était prodigué aux externes et aux pensionnaires par Annie, Isabella et Annabella McIntosh, et leur mère, Mme Neil McIntosh, participait également à la direction de l’école. En 1873, l’école a été reprise par Mme Robert M. Watson.
Voici une photographie d’Isabella et d’Annabella McIntosh en 1881. Les deux sœurs avaient cessé d’enseigner à Bute House en 1873, vraisemblablement pour prendre soin de leur mère malade, emportée par la tuberculose en 1874.
En décembre 1901, les abonnements au Y.M.C.A. de McGill avaient augmenté à tel point que les réunions du dimanche devaient avoir lieu au Musée Redpath, puisqu’il n’y avait plus suffisamment de place dans l’édifice du Y.M.C.A. pour accueillir tout le monde en même temps.
On planifia de construire un immeuble plus grand, et c’est ainsi que Strathcona Hall fut inauguré officiellement en octobre 1905. Lorsque la tour de bureaux Place Mercantile était en construction au début des années 1980, Strathcona Hall s’est effondré en partie et a été complètement rebâti.
Aujourd’hui, cet immeuble est occupé par l’entreprise Cascades.
5. PORTAIL DE L’UNIVERSITÉ MCGILL
L’Université McGill a été fondée après la mort de James McGill (1744-1813), un riche marchand qui avait légué son domaine de 46 acres, Burnside, à la Royal Institution for the Advancement of Learning, à la condition qu’un établissement d’enseignement supérieur y soit construit. La fondation de l’université fut compliquée par de nombreux problèmes juridiques, mais McGill College ouvrit finalement ses portes en 1829 et sa première faculté, celle de médecine, fut inaugurée officiellement.
L’University of McGill College (titre souvent utilisé pour désigner l’établissement avant 1885) connut de nombreuses difficultés financières à ses débuts, et ce n’est en 1843 que les deux bâtiments que l’on voit dans la deuxième photographie furent construits et que la faculté des arts fut établie.
À l’origine, le domaine Burnside de James McGill partait de ce qui allait devenir la rue Dorchester (aujourd’hui le boulevard René-Lévesque) au nord et rejoignait presque l’actuelle avenue du Docteur-Penfield. Il était bordé du côté ouest par la rue University (aujourd’hui le boulevard Robert-Bourassa), et s’arrêtait du côté est un peu avant ce qui est aujourd’hui la rue McTavish.
Afin d’amasser de l’argent pour l’université, les autorités décidèrent de louer, et plus tard de carrément vendre, les terrains situés au sud de la rue Sherbrooke. Un plan fut dessiné pour diviser la propriété en petits lots et y ouvrir des voies, donnant ainsi naissance à l’avenue McGill College.
En 1869, John William Dawson occupait le poste de directeur de McGill depuis 14 ans. Dawson voua un intérêt particulier à l’amélioration des terrains qui, à son arrivée, étaient « non clôturés, laissant les vaches y brouter à loisir ». De l’autre côté de la clôture en bois bien entretenue de la rue Sherbrooke, les jeunes arbres qu’il avait soigneusement plantés – encore frêles en 1859 – avaient commencé à pousser vigoureusement le long de l’avenue.
6. DAVIES SCHOOL OF INTERIOR DECORATION
Selon les registres du studio Wm. Notman & Son Ltd., cette photographie avait été commandée par la Laurentide Construction Company, probablement les entrepreneurs ayant construit l’immeuble de bureaux. Peu après la fin des travaux en 1931, le bâtiment accueillait plusieurs locataires, dont une librairie et une bibliothèque de prêt, un marchand de radios, un plombier, un concepteur et fabricant d’appareils d’éclairage et l’école de décoration intérieure Davies.
W. H. Davies travaillait comme décorateur d’intérieur depuis 35 ans lorsqu’il a ouvert cette école dans son nouveau studio à l’automne 1931. Dans ses publicités, Davies affirmait que ses cours s’adressaient à « ceux qui désiraient se qualifier comme décorateurs d’intérieur, ou apprendre à décorer leurs maisons avec art et distinction ».
7. L’AVENUE MCGILL COLLEGE EN DIRECTION SUD
En 1869, l’avenue McGill College était une voie résidentielle prestigieuse, bordée de chaque côté par d’élégantes maisons en rangée inspirées des résidences typiques de Londres ou d’Édimbourg.
Le caractère paisible et non commercial de l’avenue à cette époque n’était pas fortuit. Dans les années 1850, lors de la mise en vente des lots sur les terrains de McGill College au sud de la rue Sherbrooke, des règles strictes avaient été imposées aux acheteurs. Les locaux à vocation industrielle y étaient interdits, tout comme les activités « susceptibles d’importuner ou d’accabler les voisins, comme les entreprises de maçonnerie, les tanneries ou autres commerces bruyants ».
8. SYNAGOGUE SHAAR HASOMAYIM
Le terme « synagogue » est d’origine grecque et fait référence à une congrégation dans une ville ou un quartier. Concrètement, il désigne le lieu où des membres de la communauté juive se réunissent pour la prière, les célébrations et l’enseignement religieux. La synagogue Shaar Hashomayim est l’une des plus anciennes congrégations juives de Montréal.
Fondée en 1846 par des Juifs anglais, allemands et polonais qui, à l’origine, se réunissaient dans un local loué sur la rue Saint-Jacques, la synagogue Shaar Hashomayim a changé d’emplacement à trois reprises. Une première synagogue fut érigée en 1859 au 41, rue Saint-Constant (aujourd’hui De Bullion), au sud de la rue De La Gauchetière.
En 1885, la pierre d’angle d’une nouvelle synagogue fut posée au 59, avenue McGill College. Inaugurée l’année suivante, celle-ci a servi la communauté jusqu’en 1922, période durant laquelle la congrégation s’est ouvert à toutes les formes d’observance du judaïsme. S’étant accrue considérablement et se sentant de plus en plus à l’étroit dans l’édifice de l’avenue McGill College, la communauté acheta un terrain à Westmount en 1920 afin d’y faire construire la synagogue actuelle.
Avant la construction de la synagogue sur McGill College, le site était occupé par la résidence d’été de James McGill, Burnside. McGill aimait passer ses étés sur son domaine qui, de son vivant, était situé bien à l’extérieur de la ville. À l’époque où sa maison fut démolie vers 1875, le paysage idyllique avec ses vastes champs illustré dans ce tableau avait disparu depuis longtemps.
Burnside, la résidence d’été de James McGill que l’on peut voir dans cette photographie datant de 1865, semble détonner un peu dans le paysage urbain autrement ordonné de maisons en rangée de l’avenue McGill College.
9. MAISON EN RANGÉE, AVENUE MCGILL COLLEGE
Entre 1886 et 1892, Mlle Maria Charlotte Gee, une infirmière et masseuse, a vécu ici, au 40, avenue McGill College, à l’angle de Burnside Place (aujourd’hui le boulevard De Maisonneuve), dans l’une des maisons en rangée d’un ensemble appelé Mount Royal Terrace.
Durant ces années, elle a ouvert un hôpital privé, agrandissant ses locaux en occupant également l’unité voisine située au sud (numéro 38). Selon une annonce parue dans un journal en 1890, le Private Hospital & Nursing Institution de Mlle Gee offrait également les services d’« infirmières formées en Angleterre » à ses clients « à l’intérieur et à l’extérieur de la ville ».
10. MAISONS EN RANGÉE SUR L’AVENUE MCGILL COLLEGE
L’ensemble immobilier appelé Mount Royal Terrace, constitué de 12 maisons en rangée à parement de brique de trois étages, chacune comprenant 13 pièces avec office et salle de bain, a été construit entre 1858 et 1859 par Henry Bulmer.
Les gens qui achetaient une résidence à cette adresse distinguée étaient souvent confortablement établis dans des professions lucratives et avaient les moyens d’employer deux ou trois domestiques vivant à domicile. Parmi les premiers résidents de cet ensemble, il y avait plusieurs marchands prospères, un courtier et un chapelier.
La maison située au bout de l’ensemble, où Mlle Gee allait plus tard installer son hôpital, avait d’abord appartenu à Alexander Walker, un marchand de tissus et d’articles de mercerie en gros.
Ces deux photographies montrent le marchand de quincaillerie en gros John Caverhill, sa femme Mary Jane Sibley et leur fils Frederick Thomas Caverhill, des résidents de longue date de Mount Royal Terrace.
11. VUE DE MONTRÉAL
Lorsque Albert Edward Cloutier a réalisé ce tableau en 1951, l’avenue McGill College s’était déjà développée en une artère commerciale. L’immeuble de bureaux situé à droite, qui s’étend de Cathcart à la rue Sainte-Catherine, est le Confederation Building, construit en 1927-1928.
Cette charmante vue de la montagne depuis l’avenue McGill College a failli être éradiquée au milieu des années 1980, lorsqu’un promoteur immobilier a proposé de construire une salle de concert et un centre commercial qui auraient fermé la rue. Grâce au travail de défenseurs de la sauvegarde du patrimoine, ce projet fut abandonné, et l’avenue McGill College fut plutôt élargie et embellie.
On peut voir au premier plan du tableau l’entrée du tunnel ferroviaire creusé sous la montagne et menant à Mont-Royal. En 1951, cette entrée aurait été située juste derrière vous, à votre droite. Elle fut recouverte par la Place Ville Marie, dont la construction a commencé en 1959 et qui a été ouverte officiellement en 1962.
Commencé en 1912, le projet du Chemin de fer Canadien du Nord était une véritable prouesse d’ingénierie pour l’époque. Des tunnels ont été creusés de chaque côté de la montagne, et semble-t-il que leur alignement n’était décalé que de quelques centimètres lorsqu’ils se sont rejoints en décembre 1913.
Il fallut toutefois attendre 1918 pour qu’un premier train puisse emprunter la voie ferrée, des difficultés entraînées par la Première Guerre mondiale ayant nui à l’achèvement du projet.
Environ un siècle plus tard, le tunnel est encore très utilisé, bien que d’urgents travaux de rénovation rendus nécessaires par le nouveau système de train léger sur rail REM viendront interrompre le service pendant quelque temps, à compter de 2020.