Montréal au travail
Coup d’œil sur divers lieux de travail montréalais dans les premières décennies du 20e siècle.
2 septembre 2021
Grâce à des photographies de la collection du Musée, il est possible de franchir la porte de certains des établissements où travaillaient les Montréalais dans les premières décennies du vingtième siècle, de revenir dans le passé pour découvrir les lieux et l’atmosphère dans lesquels les hommes et les femmes de cette époque exerçaient leurs métiers. Cette incursion dans les espaces de travail d’autrefois nous permet de constater que même si certaines des occupations illustrées existent toujours, les conditions de travail ont radicalement changé. Ces images montrent la concentration de l’activité économique de Montréal dans le secteur qui constitue aujourd’hui l’arrondissement Ville-Marie.
L’entreprise Dechaux Frères Limitée offrait des services de nettoyage et d’entretien pour une multitude d’articles, comme des vêtements, des tapis et des rideaux. Dans cet atelier consacré aux articles d’exception faits de diverses matières, on peut voir quelques robes de soirée, un châle brodé à longues franges et un tapis. Chaque ouvrière semble absorbée dans son travail : les soins de grande qualité apportés aux vêtements de luxe faisaient la fierté de cette compagnie.
Le studio de photographie que William Notman (1826-1891) a créé dans son propre logis de la rue De Bleury en 1856 a prospéré en tant qu’entreprise familiale, de père en fils, jusqu’en 1935, année où l’agence Associated Screen News en devint propriétaire. Consacré essentiellement au portrait, le studio Notman & Son a été témoin de l’évolution de la société montréalaise durant presque un siècle. Il a formé de nombreux photographes et comptait 55 employés dans les années 1870. Datant des années 1930, cette photographie du studio alors sous la direction de Charles Frederick Notman (1870-1955) – prise à une période où les appareils portatifs lancés par Kodak étaient très populaires parmi les amateurs – révèle que les portraits de studio étaient toujours réalisés avec un gros appareil à plaques sur trépied. En revanche, un dispositif d’éclairage complexe avait remplacé la lumière naturelle utilisée dans le premier studio.
Ces hommes travaillent à l’atelier de l’usine Berliner, au 1170, rue Saint-Antoine, dans le quartier Saint-Henri. Ils sont affectés à l’opération des presses servant à la fabrication des disques pour les gramophones. Emile Berliner (1851-1929), Américain d’origine allemande, est l’auteur de cette invention (1888) qui a rendu la musique accessible au grand public. En 1899, Berliner a fondé une compagnie à Montréal pour obtenir les droits exclusifs de fabrication et de distribution de son gramophone au Canada. Cette même année, la compagnie ouvrait son premier magasin de vente au détail, Berliner Gram-o-phone, dans la rue Sainte-Catherine Ouest.
Dans cette boutique de la rue Sainte-Catherine Ouest, le Dr Henry Deimel vendait sa propre marque de sous-vêtements pour hommes et femmes. Il faisait valoir que ces articles confectionnés en linen-mesh, un tissu à base de lin, favorisaient une bonne aération de la peau. À cette époque, dans la plupart des commerces de vêtements, les clients ne pouvaient pas, comme de nos jours, examiner la marchandise librement. Ainsi, dans cette élégante boutique, des vendeurs attendent la clientèle pour lui montrer les articles qui se trouvent dans les boîtes derrière les comptoirs.
Durant une assez longue période, soit de 1850 à 1940 environ, il était courant de faire graver des monogrammes ou des motifs décoratifs sur des pièces d’argenterie, que ce soit pour en identifier le propriétaire ou les embellir. En 1923 à Montréal, des compagnies comme Royal Silver Plate Co., Rubenstein Bros. et Henry Birks & Sons, spécialisées dans le placage des métaux et dans l’orfèvrerie, offraient ce service à leurs clients. Cette activité commerciale a périclité au cours du vingtième siècle.
Ce spacieux salon de barbier se trouvait dans le nouveau Y.M.C.A. (Young Men’s Christian Association) du centre-ville, construit en 1912 dans la rue Drummond. L’organisme offrait plusieurs services dans le but de favoriser l’éducation et le développement moral et physique des jeunes gens. L’édifice comprenait notamment une bibliothèque, une allée de quilles, un billard, une salle à manger, ainsi que des salles de toilettes avec douches et baignoires.
La brasserie Dawes fut l’une des premières à Montréal. Fondée en 1826 par Thomas Dawes (1785-1863), elle était située sur le bord du canal de Lachine et possédait des bureaux dans la rue Saint-Paul Ouest. Quatre générations de Dawes ont dirigé l’entreprise. En 1909, Norman James Dawes (1874-1967) créait la National Breweries Ltd., un consortium formé de plusieurs brasseries indépendantes. La bière produite par la branche Dawes était appelée Black Horse, en hommage au splendide percheron noir dont la famille faisait l’élevage. Grands amateurs de chevaux, les Dawes avaient leurs propres écuries et se servaient des chevaux pour la livraison de la bière.
Située à Lachine, la brasserie Dawes regroupait divers ateliers, dont une tonnellerie. La fabrication des tonneaux à bière comprenait plusieurs étapes, depuis le façonnage des douves en bois de chêne brut jusqu’au cintrage qui donne sa forme définitive au baril. Ici, un des employés est en train d’exécuter une des dernières tâches, le perçage de la bonde. À l’époque de cette photographie, la brasserie Dawes faisait partie du groupe National Breweries Ltd., tout comme une autre entreprise brassicole populaire au Québec, la brasserie Dow, qui donnera son nom au consortium en 1952.
Le casse-croûte Shap’s appartenait à Bernard et Beatrice Shaposnick, des immigrants d’origine russe qui avaient commencé par exploiter un petit comptoir de tabac et de bonbons sur le boulevard Saint-Laurent en 1923. Ils ont su faire progresser leurs affaires, notamment en ouvrant cet établissement qui attirait les amateurs de jus d’orange, de sodas et de crème glacée.
Ce casse-croûte ouvert par Fanny et Ben Kravitz est à l’origine du fameux restaurant Bens De Luxe Delicatessen du boulevard De Maisonneuve, où l’on pouvait commander 24 heures sur 24 des sandwichs au smoked meat avec de la moutarde et des cornichons. La famille Kravitz a exploité ce commerce jusqu’en 2006. Comme beaucoup d’immigrants d’Europe de l’Est, Fanny et Ben ont démarré leur entreprise dans leur propre logement, qui était situé sur le boulevard Saint-Laurent.
L’ébéniste Honoré-Paul Labelle (1852-1940) a fait des études commerciales au Collège Masson de Terrebonne. En 1888, il a fondé une manufacture de meubles qui a été très prospère. Située dans la rue Notre-Dame, celle-ci employait près de 90 personnes en 1894. En 1910, l’entreprise s’est installée dans un magasin de sept étages que Labelle a fait construire rue Sainte-Catherine Est.
Cette photographie a été prise dans le bureau de la première agence de publicité au Canada fondée à Montréal par Anson McKim en 1889. Les employés, dont un bon nombre de femmes, travaillaient à l’époque dans le quartier des affaires, au 165, rue Saint-Jacques.