Parachute : l’équipe du mannequinage place haut la barre !
Visite dans les coulisses de la salle de montage des costumes, où l’équipe prépare les vêtements présentés dans l’exposition Parachute.
30 novembre 2021
Un élément clé de l’exposition Parachute : Mode subversive des années 80 consiste à recréer l’expérience que vivait la clientèle dans les boutiques iconiques de la marque. Pour arriver à reproduire le style graphique de Parachute, l’équipe formée de Caroline Bourgeois, Patrick Migneault et moi-même a fabriqué sur mesure plusieurs supports et utilisé de nouvelles techniques pour présenter des ensembles de vêtements, comme la mise à plat sur plan incliné et la suspension sur tringle de bois, dont j’étais chargée.
À première vue, ce mode de présentation peut sembler simple. Mais, comme on le verra, derrière cette simplicité apparente, il y a tout un défi technique !
De façon générale, ce mode de présentation minimaliste convient particulièrement bien à un vêtement léger et de coupe simple comme le kimono, qui reste facilement en place une fois enfilé sur la tringle.
Contrairement aux kimonos, toutefois, les ensembles Parachute à suspendre sont composés de plusieurs éléments à superposer, tels que vestes et chemisiers. De plus, ceux-ci n’ont pas des manches taillées à angles droits, mais sont dotés de larges épaulettes et comportent diverses attaches et fermetures qui ajoutent un certain poids à l’avant du vêtement. C’est le premier défi que j’ai dû relever : les vêtements, une fois enfilés sur la tringle, avaient tendance à « basculer » vers l’avant et, par conséquent, à perdre leur forme caractéristique. Pour contrer cet effet et, surtout, pour alléger la tension exercée sur les vêtements, j’ai fabriqué des tringles sur mesure pour chacun des ensembles. Le second défi a été de suspendre les pantalons et les jupes.
Le processus
Pour cet ensemble, qui se compose d’un chemisier blanc, d’une veste noire et d’une jupe droite asymétrique, la première étape a consisté à fabriquer la tringle elle-même. Un goujon de bois a été coupé et peint par Patrick Migneault, préparateur aux Expositions, puis recouvert d’un film protecteur. La tringle a été en partie recouverte de bourre de polyester afin de minimiser la tension qui s’exerce dans la partie supérieure du vêtement lorsqu’il est suspendu.
En superposant plusieurs fines couches de bourre, j’ai donné à la rembourrure une forme ovale. En effet, accorder plus d’épaisseur sur les côtés et le bas et moins sur le haut me permettait d’obtenir le soutien voulu tout en assurant une belle continuité visuelle entre les vêtements et la tringle. Certaines parties de la tringle, dont les zones rembourrées, ont ensuite été couvertes de feutre, un tissu qui grâce à sa surface texturée contribue à la stabilité du vêtement.
Pour bien suspendre la jupe, nous avons fabriqué une forme taillée dans de l’Ethafoam®. Au départ, elle n’avait que peu d’épaisseur. Après quelques essais et ajustements, toutefois, le devant et le dos de la jupe avaient tendance à adhérer l’un à l’autre. J’ai résolu ce problème en donnant plus d’épaisseur à la forme. En évoquant subtilement les courbes du corps, celle-ci permet au vêtement de tomber plus naturellement tout en réglant le problème d’adhérence. Un jupon en coton a été ajouté pour donner du volume au bas de la jupe.
La jupe ayant un certain poids, j’ai aligné deux séries d’aimants, l’une positionnée sur la jupe et l’autre fixée sur le support afin d’obtenir un soutien adéquat à la taille. Enfin, des « bretelles » de coton, ajustables à l’aide de Velcro, m’ont permis de régler avec exactitude la hauteur de la jupe pour assurer les bonnes proportions de l’ensemble.
Une fois la jupe et le chemisier en place, j’ai constaté qu’on pouvait voir le noir de la jupe au travers du tissu diaphane du chemisier, ce qui rompait l’uniformité. J’ai résolu ce problème en insérant sous le chemisier un panneau blanc opaque en coton reproduisant la forme des pans. Cela a permis de redonner au chemisier tout son éclat et de maximiser l’impact visuel de l’ensemble.
J’ai porté une attention particulière aux cols des vêtements, qui avaient tendance à « bâiller ». Le patron de chacun des cols a été reproduit pour fabriquer des supports invisibles en Mylar®, un plastique chimiquement stable qui leur permet de tenir en toute sécurité.
Enfin, le montage est complet et les vêtements prêts à être exposés !
Chaque montage de costume pose des défis uniques en matière de conservation préventive. Dans ce cas précis, il fallait arriver à soutenir les vêtements tout en faisant en sorte qu’ils tombent naturellement, reflétant ainsi l’attitude relaxe et l’allure graphique de la marque Parachute. En réinterprétant le système de suspension sur tringle et en trouvant des solutions créatives, j’ai réussi à présenter ces créations vestimentaires d’une façon sûre et contrôlée qui respecte les normes muséales.
Le résultat – vous en conviendrez, j’espère – est un style de présentation audacieux qui, tout en mettant en valeur la coupe de chaque vêtement, rehausse l’expérience visiteur et s’inscrit à merveille dans la trame narrative de l’exposition.