Le vêtement n’a pas de genre
Déconstruire les normes établies au travers des vêtements qui s’adaptent à une notion de genre de plus en plus fluide.
1 avril 2021
Depuis que je me suis rasé la tête l’été dernier, ma définition de la féminité est devenue plus fluide. Je me suis alors posé la question : en quoi mon apparence influence-t-elle ma notion de la féminité et de la masculinité? Il faut croire que je ne suis pas la seule à me questionner à ce sujet.
Plusieurs célébrités masculines ont ainsi troqué le pantalon pour la crinoline et la jupe afin de contester l’idée statique du genre. Pensons à Harry Styles vêtu de sa robe Gucci ou à Billy Porter portant une robe de soirée signée Christian Siriano. Ces artistes nous font réaliser qu’il est de plus en plus important de comprendre pourquoi un vêtement tend à être associé davantage à un genre plus qu’à un autre et pourquoi aujourd’hui ces associations sont de moins en moins valables.
Qu'est-ce que le genre?
Tout d’abord, le sexe et le genre sont définis différemment. Selon le Lexique sur la diversité sexuelle et de genre du gouvernement du Canada, le genre est influencé entre autres par la construction sociale et culturelle des rôles et par l’expression personnelle. Le genre n’est ni confiné à une binarité, ni constant à travers les époques et les cultures. Par exemple, il peut s’appliquer aux femmes, aux hommes, aux personnes non binaires, aux Hijras du sous-continent indien, aux personnes autochtones bispirituelles, aux Māhū, etc.
Si tout le monde peut porter un pantalon, pourquoi pas aussi la jupe?
À l’automne 2020, plusieurs élèves masculins fréquentant des écoles secondaires au Québec ont décidé de porter la jupe plutôt que le pantalon. Leur but était de dénoncer l’hypersexualisation des filles et l’imposition de codes vestimentaires dans le milieu scolaire. Ils ont ainsi fait manchette dans la plupart des médias.
L’exposition Dévoiler ou dissimuler, présentée au Musée McCord Stewart en 2008, explorait la relation entre le vêtement et le corps des femmes, la sexualisation de la mode enfantine et la préoccupation suscitée par l’image du corps. Plusieurs année plus tard, ces sujets sont toujours d’actualité.
Dans une entrevue accordée au magazine Vogue, Billy Porter a fait part de sa réflexion sur la stigmatisation des hommes qui décident de porter des jupes : Qu’est-ce que la masculinité? Qu’est-ce que cela veut dire? Les femmes portent le pantalon tous les jours, mais dès qu’un homme porte une robe, il déclenche un raz-de-marée.
Conventions vestimentaires fluides
À la fin du 19e siècle, les vêtements pour femmes commencent à intégrer petit à petit certains éléments de la garde-robe masculine. Présenté dans l’exposition Lui : la mode au masculin en 2003, ce tailleur pour dame emprunte certains détails au costume masculin, comme le tissu et les techniques de confection. Le tailleur était un symbole d’indépendance pour plusieurs femmes qui entraient pour la première fois sur le marché du travail.
Vers le milieu du 19e siècle, la profusion de broderies sur les gilets habillés permet aux hommes de se distinguer. Souvent orné de motifs floraux brodés dans des couleurs vives, le gilet contraste grandement avec le reste des vêtements masculins – manteaux, pantalons, vestons, etc. – qui demeurent sobres.
Le vêtement ne définit pas le genre
Si on a longtemps affirmé que les femmes n’étaient pas faites pour porter le pantalon considéré inapproprié pour plusieurs activités quotidiennes, le même discours pourrait-il s’appliquer aujourd’hui aux hommes qui portent la jupe? Peu importe la coupe, les broderies, les couleurs ou autres, les caractéristiques vestimentaires n’influencent pas notre identité de genre. Comme l’a dit si bien l’artiste et designer Alok Vaid-Menon lors d’une conférence organisée par The Business of Fashion en 2019, dégenrer l’industrie de la beauté et de la mode ne signifie pas la mort de la mode, mais sa renaissance.